HISTOIRE DE ROUTE


FARIO LA RéVOLTE RACONTE RACE OF THE ORIGINS

Posté le 14 Novembre 2012 - retour carnet de route


Fario La Révolte Nos vies sont bâties sur des aventures, celle à laquelle nous venons de survivre en fait sans doute partie, après tout, ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort.
Partir de nuit, de 1000 m d’altitude, en novembre, alors que le week-end précédent il y avait 5 cm de neige, du vent et des températures négatives nous avait imposé une certaine sagesse. A minuit, ce vendredi là, mécaniquement et psychologiquement nous pensions être prêt.

J’ouvre les yeux, je les referme… l’effort que me demande l’arrachage de mes gants pour consulter ma montre m’est insupportable. J’essuie la buée du cadran, il est 2H21, mon frère et moi sommes dans le sas d’une banque BNP Paris-Bas de La voulte adossé au guichet nous tentons de retendre la courroie de la Motobec qui depuis 20 kilomètres cire et patine sous l’effet des trombes d’eau que nous avalons. Rien à faire, on doit se résoudre à repartir sous des rideaux de pluie glacée laissant le vario de la L99 hurler sa peine…

J’ouvre les yeux, je les referme, là il doit être 3H30 passé. Je ne sais plus si j’ai froid, tout mon corps est engourdi, ma combinaison de ski pèse une tonne et je sens des filets d’eau me couler sur l’échine et les jambes, ça me pique me colle m’enmerde… rajouter à cela le vent qui nous glace et la pluie qui cingle nos visages… je découvre et savoure la vraie définition du verbe subir.

J’ouvre les yeux, je les referme… tous les moyens sont bons pour s’échapper de cet enfer, mon esprit nous invente une nouvelle quête dans laquelle les frères Maridat chevauchent des TSA lancées à notre poursuite. Nous sommes depuis longtemps écœurés de chiffre : 48 kils avant Malaucène, 5 minutes d’avance sur la fratrie des peugeots, conso moyenne, prochain écart, route touristique, faux raccourcis, dénivelé, vrai col, des déscisions sont prises, on ne les discute plus, parler est devenu un luxe, nous on roule.

J’ouvre les yeux, je me réveille : mon pot vient de me lacher une fois de plus… ça commence à devenir inquiétant, d’un autre côté le bruit produit par ma SP à le mérite de me sortir de ma torpeur et cette panne me fait enfin utiliser les outils que je prends généralement pour rien au final. La pince croco mord l’anneau de serrage, mes gants fondent sur le moteur où je m’appuie, il est 4H30 l’odeur du plastique crâmé remplace celle des croissants, le romantisme est à son paroxisme…

J’ouvre un oeuil, l’autre je le ferme… il est 4H57 cette 5eme heure est un calvaire, nous sommes proche du Ventoux et depuis peu, je m’essaye à une nouvelle technique consistant à tourner la tête à 90° vers la droite, fermer l’oeuil gauche afin de le protéger des impacts des gouttes qui explosent mes yeux. J’ai réalisé l’état que devait avoir ma gueule lorsque j’ai vue celle de Big Rems les yeux rouge injectés de sang…

J’ouvre les yeux, je les referme… cette fois c’est la fin, je suis en pleine dépression, les phases d’euphories laissent place à de longs instant de déroute, de creux de vagues… Nous prenons des relais, nous nous poussons dans les côtes, nous nous relayons dans les longues descentes, mais là plus rien ne m’amuse. Il pleut des sceaux d’eau depuis maintenant 7 heures et la seule chose qui me fait encore marrer c’est quand je repense à mon petit frère qui dans la première heure évitait les flaques sur la route !!

J’ouvre les yeux, je me les frotte, je les referme… il pleut encore mais cette fois c’est l’apocalypse !!! en tombant sur le bitume les gouttes font de grosses bulles, les fossés se sont transformés en ruisseaux et des torrents de sables traversent régulièrement notre chemin de croix… tien il fait jour, le ciel est noir mais il fait jour… plus qu’un village à validé, je ne sais même plus son nom, Palmolive ? Auxolives ? Cadolive ?...les bois de pépiole ont-ils un jour existés ?

Je n’en crois plus mes yeux depuis longtemps, je les ouvre puis les referme, mais là c’est l’apothéose ; il nous faut maintenant traverser Marseille, sol glissant, voiture partout, pluie bourrasque de vent, panneaux de signalisation incompréhensible, je ne sais plus trop ce que je souhaite le plus, la fin de la pluie de cette course ou du monde.

10H50 La Samaritaine est enfin là, je l’avais imaginé chaude et acceuillante, je la voyais à mille facettes, je la voulais trop belle pour moi, et là, ne se trouve qu’une verrière embuée, les égouts dégorgent tout autour, certainement que les mouettes se cachent pour mourir, des travaux et des grilles nous barrent les 25 derniers mètres, derrière on nous assure qu’il y a la mer, nous on la toujours pas vu, normal.

Je mets ma SP 50 au garde à vous, je cherche le regard de mon frère, cette nuit j’ai compris des choses, des choses qui ne se racontent pas, étrangement j’ai chaud au cœur, … une dernière fois j’ouvre les yeux, je les referme… il me reste une ultime chose à accomplir : allez noyer une double moresque…

Pour conclure, a l’invective d’un Professeur exalté je répondrai par une simple phrase chargée de double sens : Les frères Panel ont terminé Race of the origins, ils ont terminé quoi ? The Race of the Origins. Ici, The Race of the Origins est donc le COD de cette phrase… mais pas que. Ou alors il faut y voir plus qu’un complément d’objet direct, du reste pour The Race of the Origins COD devrait definitivement être les initiales de Course d’Orientation Démoniaque.

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